5.Quel avenir pour les forêts de montagne ?

La forêt future sera, comme dans le passé, fonction du climat et de l’action de l’homme. Mais comment composer avec un climat qui évolue trop vite et dont l’ampleur du changement est encore incertaine ? Le forestier bénéficie des résultats de la recherche et se base aussi sur ses propres observations.

À l’étage montagnard inférieur et moyen, jusqu’à 1600 mètres d’altitude environ, les forêts des Alpes du Sud sont majoritairement constituées d’essences qui atteignent leur limite méridionale. Ces dernières ont été très affectées par les sécheresses successives entre 2003 et 2007, avec des mortalités et des dépérissements observés sur le terrain. Ainsi, le pin sylvestre et le sapin pectiné ont subi des dégâts spectaculaires en 2004 et 2005, dans l’ensemble des Préalpes pour le premier, et principalement dans les Alpes-Maritimes pour le second. Depuis, la mortalité est plus diffuse, mais un grand nombre d’arbres restent affaiblis, surtout s’ils sont infestés par le gui. Le dépérissement du hêtre se concrétise par des descentes de cime et une mortalité, et celui-ci a été aggravé localement par les effets de l’ozone (Cf. §3.6) au cours de l’été 2007. Au-dessus de 1600 mètres d’altitude, le sapin se porte mieux, tout comme le mélèze et le pin à crochets. À l’échelle régionale, les mortalités restent toutefois limitées. Elles ont touché préférentiellement des peuplements âgés, trop denses ou enracinés dans un sol mince. Ces atteintes à la forêt ont un impact économique et paysager, mais ne remettent pas (encore) en cause la fonction de protection physique que la forêt assure souvent.

Sapinière dépérissante, forêt de Clans, Alpes-Maritimes

Ce constat confirme globalement les résultats des modèles d’évolution de la répartition des essences. On s’attend donc à des déstabilisations de la composition des forêts dans les décennies à venir. Aux effets directs du changement climatique pourraient s’ajouter des attaques d’insectes ravageurs favorisés par le réchauffement, comme les scolytes qui ont décimé les épicéas à basse altitude dans les Alpes du Nord. La régression des espèces sciaphiles auxquelles appartiennent le sapin et le hêtre semble inéluctable sur leur frange inférieure et sur les sols superficiels. L’avenir du pin sylvestre est très incertain tandis que le pin noir d’Autriche des forêts exploitées par les services de Restauration des terrains en montagne (RTM) est plus résilient.

Dans l’étage subalpin, on mise sur la grande plasticité du mélèze et du pin à crochets, malgré quelques premières alertes. Quant à l’épicéa commun qui occupe des surfaces réduites, il n’aura bientôt plus sa place dans les Alpes du Sud. Ces retraits libéreront des surfaces au profit d’essences plus méditerranéennes et seront partiellement compensés par une lente progression en limite supérieure.

Face à ce scénario, le gestionnaire forestier en montagne tente d’adapter les forêts, avec des leviers d’action limités. Il peut conforter les peuplements existants en réduisant la densité et l’âge d’exploitabilité, et en préservant les essences d’accompagnement. Il a aussi recours au changement d’essence, en remplaçant, par exemple, le sapin par le cèdre de l’Atlas.

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