3 questions à I. GARCIA DE CORTAZAR-ATAURI
Quels sont les impacts du changement climatique sur les vignobles des Côtes-du-Rhône ?
Comme dans les autres régions de France, nous attendons une augmentation de la température de l’air dans les vignobles des Côtes-du-Rhône qui va certainement provoquer un avancement de la phénologie (débourrement, floraison, véraison) et de la récolte d’environ 8 à 10 jours par degré d’augmentation de la température (résultats CLIMATOR). Ce changement va affecter la croissance de la plante, mais aussi les conditions climatiques de la période de maturation. Celle-ci aura lieu au moment le plus chaud de l’été (courant juillet-août, plutôt que août-septembre) et cela va modifier en partie les caractéristiques organoleptiques des raisins à la récolte. Par ailleurs, des changements sont attendus concernant la pluviométrie avec une diminution significative pendant la période estivale. Cela va affecter l’état hydrique de la plante et sa capacité de production. Néanmoins, ces phénomènes ne vont pas affecter de la même manière la plante selon le type de sol de chaque parcelle. Enfin, concernant les maladies, des modifications sont aussi attendues. Les premières études montrent notamment une diminution de la pression de maladies cryptogamiques due à des conditions climatiques moins favorables à leur développement (i.e. moins de jours de pluie).
Les terroirs viticoles méditerranéens actuels (PACA) seront-ils encore propices à la culture de la vigne dans 25 ans ? Faut-il envisager une redistribution spatiale des vignobles ?
Les informations relatives à l’évolution du climat ne nous font pas penser actuellement que les vignobles des Côtes-du-Rhône ne seront plus viables dans 25 ans. Par contre, les impacts décrits plus haut nous montrent que certaines adaptations seront nécessaires à court et long terme. Des études en cours sur le climat de certains vignobles nous montrent que des variations climatiques significatives existent dans des zones assez réduites (1-2°C de variation dans une zone de 25 km²). On peut imaginer qu’une redistribution des parcelles annulerait ou atténuerait les effets du changement climatique. Autrement dit, une parcelle qui serait aujourd’hui trop tardive ou trop fraîche, n’atteignant pas le niveau de qualité souhaité, pourrait atteindre ce dernier sans problèmes majeurs d’ici quelques années. Dans ce contexte, il est très important de faire une bonne analyse climatique à fine échelle de nos vignobles.
Existe-t-il des moyens d’adaptation et des opportunités pour les viticulteurs ?
Plusieurs voies sont étudiées actuellement par l’Inra qui a comme objectif d’évaluer et proposer des stratégies d’adaptation des vignobles face au changement climatique. Parmi les adaptations étudiées (autres que la redistribution parcellaire décrite plus haut), nous pouvons citer : la recherche de nouvelles variétés ou de clones de variétés déjà cultivées qui seront mieux adaptés aux conditions futures et donc capables de supporter des fortes températures ou le stress hydrique ; la gestion de la conduite pour changer le microclimat de la plante et améliorer les conditions climatiques pendant la maturation ; le développement de certaines techniques œnologiques (par exemple, la désalcoolisation ou l’acidification des vins) ; l’introduction de l’irrigation pour atténuer les effets des fortes températures et du stress hydrique sur la qualité du raisin et maintenir un certain niveau de production… Néanmoins, les adaptations ne seront pas les mêmes selon les zones géographiques, les vins recherchés (rosé, blanc, rouge) et les types de sol disponibles de la région. Comme dans d’autres régions, certains secteurs situés en altitude pourraient devenir propices à la culture de la vigne. Enfin, un travail commun avec les partenaires de la filière (instituts techniques, interprofessions, producteurs, syndicats…) est nécessaire pour bien identifier et définir ces stratégies d’adaptation.