Du global au local… et réciproquement
Penser globalement et agir localement : cette maxime encore très en vogue dans un passé récent est tout particulièrement adaptée à la question du changement climatique. Les actions anthropiques et, au premier rang, les émissions de gaz à effet de serre (GES), sont directement intégrées à la grande machinerie atmosphérique pour agir au bout du compte sur le système climatique global dont les modifications sont ensuite redistribuées aux différentes échelles sous-jacentes. Les manifestations de ce changement, par le biais des processus atmosphériques et de la circulation océanique, des zones bioclimatiques, du temps qu’il fait (météo) aussi bien que des tendances climatiques à long terme, sont de caractère régional (au sens de grandes zones géographiques avec l’acception adoptée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, connu sous l’acronyme GIEC) ou local, dans leur occurrence, leurs caractères et leurs implications. Les décisions à prendre sur la base de la science climatique doivent donc considérer tout un continuum d’échelles spatiales.
Ces contraintes sont prises en compte dans l’élaboration des projections climatiques et l’identification des impacts attendus, aussi bien en termes biophysiques que sociétaux. Il a d’abord été nécessaire de passer par des modélisations à l’échelle de la planète qui ont permis de définir les grandes tendances à un niveau global, puis il est vite apparu que les interrogations sur le futur allaient susciter des études de plus en plus fines, en lien avec les échelles spatiales de fonctionnement des écosystèmes naturels et des activités humaines. Les progrès combinés des modèles climatiques et des outils informatiques ont apporté des éléments d’analyse à ces échelles. Dans les années 2000, la maille élémentaire des modèles était encore de l’ordre de 250 km, ce qui permettait d’identifier des tendances pour des grandes régions à l’échelle infra-continentale. Mais il a fallu attendre encore quelques années pour que le passage à une maille de 50 km soit plus compatible avec la dimension des écosystèmes ou des bassins versants. Et c’est le passage récent à une résolution de 8 km qui a permis d’atteindre une « granularité » compatible avec les activités humaines.
C’est à cette dernière échelle que les mesures pour limiter l’ampleur du réchauffement global doivent être définies. Si c’est au niveau mondial que les grandes décisions géopolitiques doivent être prises, c’est aux échelles inférieures que ces décisions doivent être déclinées.
Zoom 1. EURO-CORDEX, les données climatiques de dernière génération
Le programme CORDEX (COordinated Regional Climate Downscaling Experiment) vise à définir un cadre international pour la régionalisation des projections climatiques. L’objectif est de proposer des données à résolution spatiale fine à partir de modèles globaux du climat (échelle planétaire) et de modèles régionaux (échelle européenne par exemple). La composante EURO-CORDEX du projet, impliquant une vingtaine d’organismes de recherche européens, a permis de produire et d’analyser des projections climatiques sur l’Europe au cours du XXIe siècle à haute résolution spatiale (12 km), en utilisant 3 scénarios de référence d’évolution des gaz à effet de serre retenus par le GIEC. Ces données sont mises à disposition de la communauté scientifique et des services climatiques dont l’objectif est de fournir une information climatique fiable aux acteurs économiques, industriels et politiques.
Med-CORDEX permettra bientôt de disposer d’une modélisation régionale dédiée au bassin méditerranéen.
POURQUOI UNE SYNTHÈSE AU NIVEAU PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR ?
Des documents d’orientation existent désormais au niveau national, en particulier sous l’égide de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique (ONERC), mais il devient souhaitable de les décliner à une échelle plus proche des décisions de la vie locale. C’est clairement au niveau des régions administratives que la synthèse des connaissances doit être recherchée, comme l’a montré le travail pionnier effectué en 2013 en région Aquitaine.
Par son appartenance au bassin méditerranéen, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur est une candidate prioritaire pour ce type d’effort de synthèse. La zone méditerranéenne a en effet été identifiée comme un des « hotspots » pour les impacts du changement climatique. Les projections climatiques dans cette région du monde tendent de manière marquée vers des conditions plus chaudes, de jour comme de nuit, avec une fréquence accrue de canicules et des épisodes de sécheresse, mais aussi des changements, encore mal documentés, sur les précipitations extrêmes. De plus, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur concentre sur son territoire une très riche diversité des milieux, de la mer à la montagne, confrontés à une forte pression anthropique.