Par S. de CHEVEIGNÉ
À la lecture de ces textes, on est frappé par la multiplicité des conséquences probables ou possibles du changement climatique : aucun secteur n’échappe à des changements profonds. Apparaissent aussi la très grande richesse et la diversité de la recherche menée autour de ces questions en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, mais aussi ailleurs. La situation est urgente et grave, mais nous disposons d’outils pour tenter d’y faire face sans tarder.
Nous l’avons vu, quasiment tous les secteurs de la vie économique vitaux pour la région seront touchés : le tourisme, l’agriculture, la pêche, les forêts, les transports, la production d’énergie… Quelques points communs émergent. La gravité des conséquences et leur coût probable incitent à tout mettre en œuvre pour réduire au maximum les causes du réchauffement. Il est malheureusement évident qu’il faut aussi chercher à anticiper les changements et atténuer leurs impacts. Cette tâche est problématique, car il est souvent difficile d’imaginer et d’évaluer leurs formes et leurs ampleurs. Des solutions techniques sont nécessaires, mais un accompagnement social l’est sans doute encore plus.
Face à ces évolutions majeures de notre environnement, il est clair que des changements de pratiques seront indispensables à tous les niveaux (citoyens, artisans et industriels, services publics, pouvoirs politiques, etc.), mais ces changements sont souvent pensés à l’envers. Au lieu de chercher à imposer des « éco-gestes » ou des « modifications de comportements », il faut au contraire comprendre la logique des fonctionnements actuels de nos sociétés et rechercher, avec les personnes concernées, des alternatives qui conservent les logiques culturelles, sociales ou économiques. Les citoyens doivent être associés à la construction de leur futur. Un développement beaucoup plus intense de procédures participatives pour explorer les scénarios, mettre à plat les intérêts contradictoires et travailler à des solutions acceptables pour une majorité d’habitants et de visiteurs de la région, est une priorité.
Des projets de démonstration par lesquels, sur un territoire ou dans une ville, des solutions globales sont testées en grandeur réelle, vont se développer, fortement soutenus par la Commission européenne. Ils doivent permettre de mettre les acteurs concernés en réseau, de développer les compétences et surtout de dégager des solutions diverses adaptées à chaque terrain ou territoire. Dans son programme Horizon 2020, la Commission européenne réserve 70% de son budget de recherche pour traiter des questions liées de près ou de loin au changement climatique : les projets de démonstrations y auront une large part et permettront d’élaborer des solutions collectives aux problèmes qui se présentent à nous.
Dans ces recherches de solutions nouvelles, une attention toute particulière devra être accordée aux populations vulnérables. Même si elles ont de grandes capacités d’adaptation, les moyens feront défaut, encore plus qu’aujourd’hui, aux personnes les plus pauvres et les plus fragiles pour améliorer ou déplacer si nécessaire leur habitat. Certaines d’entre elles viendront d’autres régions du monde, chassées par les bouleversements en cours. Toutes subiront les conséquences du changement climatique tant au niveau sanitaire qu’économique. Face à des événements plus extrêmes, canicules ou tempêtes, ces populations devront être particulièrement bien accompagnées et protégées.
Ne perdons pas de vue, cependant, que les changements qui se profilent apporteront aussi des opportunités de renouvellement, de réorganisation, de création de nouveaux emplois. Ce sera l’occasion de développer la transversalité entre secteurs, de promouvoir l’économie circulaire, de penser ensemble les évolutions de nos sociétés. Nous n’aurons plus les moyens de mener des politiques contradictoires d’un service de l’État à un autre, d’une collectivité à une autre. Nous ne pourrons plus gaspiller l’eau et l’énergie, ni les autres ressources naturelles et la biodiversité deviendra encore plus précieuse. Des modes de gouvernance plus attentives aux personnes et à la nature seront nécessaires. De nouveaux métiers, de nouvelles coopérations et synergies émergeront. À nous de nous y atteler rapidement.
Par S. DHENAIN et E. HOCQUET
Qu’ils les subissent ou les anticipent, les territoires locaux doivent faire face aux changements liés au climat. Pour y répondre, des politiques publiques dites d’adaptation s’insèrent peu à peu au niveau local. Elles ont été impulsées à l’échelle internationale et européenne, puis relayées au niveau national et se déclinent aujourd’hui en actions locales très concrètes.
La place conférée par les lois « Grenelle » aux collectivités territoriales témoigne de la volonté du législateur de les élever au rang d’acteurs privilégiés de mise en œuvre en la matière. Les politiques d’adaptation obéissent à une logique horizontale et sont intégrées à de nombreux domaines de l’action publique. L’intégration de l’adaptation dans les politiques existantes environnementale et autres constitue la voie la plus empruntée. Sur le front de l’opérationnel, « l’adaptation au changement climatique » et ses composantes (robustesse, gestion adaptative), bien que peu connues actuellement, commencent à traverser les politiques publiques françaises et ouvrent un champ professionnel et technique qui est en train de se mettre en place. Ces actions se cherchent encore. Nombre d’entre elles sont centrées, en premier lieu, sur l’amélioration de la connaissance des phénomènes climatiques et de leurs impacts locaux. Certaines visent à anticiper les futures conditions climatiques possibles et insistent sur des actions sans regret comme les économies d’eau, et d’autres visent à gérer les effets d’ores et déjà tangibles du changement climatique (hausse du niveau de la mer, îlot de chaleur urbain, etc.). Elles amènent à questionner les modes de vie et les modes de développement.
La région Provence-Alpes-Côte d’Azur a entériné ses principales orientations « d’adaptation » dans le cadre de son schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie adopté en 2013. Il s’est traduit par la suite en mesures et actions au sein des plans climat-énergie. Au nombre de vingt, ces derniers constituent les principaux outils de planification et doivent s’articuler juridiquement avec de nombreux documents d’urbanisme à l’image des plans locaux d’urbanisme ou encore des schémas de cohérence territoriale (SCOT). Leur contenu à géométrie variable est arrêté en fonction des risques climatiques identifiés à chaque échelon territorial compétent (départements, communauté urbaine Marseille Provence Métropole, etc.). Outre la question de leur articulation, les questions de compatibilité, d’évaluation, de suivi et de contrôle se posent avec acuité à l’heure où les premiers bilans sont attendus.
La période actuelle est celle des prémices de l’adaptation, à la recherche de solutions robustes et de bonnes pratiques. La région PACA représente un terreau fertile et inventif de mise en œuvre des politiques locales d’adaptation, comme en témoigne notamment la création du GREC-PACA.