3.Perception des risques induits par le changement climatique dans deux grandes villes : Marseille et Nice

Alexandra Schleyer-Lindenmann (ESPACE), Ruchi Mudaliar (ESPACE), Parul Rishi (IIFM) & Samuel Robert (ESPACE)

Le changement climatique s’exprime de différentes manières sur les territoires. En contexte littoral, les risques liés à la mer, et en contexte urbain les canicules en sont les manifestations les plus évidentes. Comment les habitants des grandes villes littorales françaises telles que Marseille ou Nice en prennent-ils conscience ? Quels facteurs interviennent dans leur perception du changement climatique et l’adoption d’éventuels comportements visant à l’atténuer ou à s’adapter à ses conséquences ? C’est la question étudiée par un collectif franco-indien de chercheurs, à Marseille et Nice, dans une enquête menée en juillet 2015.

475 habitants de Marseille et de Nice, vivant ou travaillant près du trait de côte, ont répondu à un questionnaire sur leur perception du changement climatique. La Figure 9 montre les phénomènes climatiques rapportés par les participants. Dans les deux villes, la canicule occupe la première place, même si elle est significativement plus citée à Marseille qu’à Nice. En revanche, tous les phénomènes liés à la mer et à l’eau (inondations, tempêtes, dégradation des aménagements côtiers et montée du niveau de la mer) sont de manière significative plus souvent évoqués à Nice qu’à Marseille. En termes de dimensions cognitives et émotionnelles de la perception du changement climatique, les résultats montrent que dans les deux villes, les participants sont tout à fait conscients du changement climatique, mais ne s’en inquiètent pas beaucoup. Ce paradoxe n’est pas propre à notre enquête, il a été aussi observé dans d’autres études sur la côte atlantique.

La dimension qui prédit le plus l’intention d’endosser des comportements d’atténuation ou d’adaptation est le stress ressenti face au changement climatique, que ce soit à Nice ou à Marseille. A Marseille se rajoutent la confiance dans les institutions et un faible sentiment de bien-être côtier comme facteurs favorisant les intentions de ces comportement, ce qui n’est pas le cas à Nice. Dans les deux villes, la connaissance du changement climatique n’a pas d’effet sur l’intention d’adopter des comportements d’atténuation ou d’adaptation.

Ce dernier résultat pose la question de l’importance de la communication du savoir et des connaissances. Certes, « connaitre » est une condition pour prendre conscience. Mais cela n’est pas suffisant. Il est aussi nécessaire de prendre en compte les émotions ou préoccupations des habitants dans la communication et les échanges autour du changement climatique. Les représentants des autorités locales sont conscients de cette dimension émotionnelle de l’adaptation au changement climatique, et demandent qu’elle soit davantage prise en considération. Ils souhaitent aussi être épaulés pour une plus grande implication de la population dans la construction collective des politiques locales d’adaptation. D’autres chercheurs soulignent ainsi la coopération nécessaire à plusieurs niveaux entre acteurs, habitants, chercheurs, artistes, associations,… pour faire avancer la réflexion et l’action à ce sujet.

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