La restauration scolaire française représente environ 8,5 millions de repas par semaine. Au-delà de la couverture des besoins nutritionnels, l’approvisionnement en denrées alimentaires pour les repas scolaires représente un véritable levier pour développer le tissu économique local et enclencher la transition vers des systèmes alimentaires plus durables.
Des règles spécifiques permettent d’assurer la qualité nutritionnelle des repas proposés aux élèves. La promulgation de la loi ÉGalim marque le début des mesures visant à améliorer la durabilité des repas servis en restauration scolaire. Les mesures principales sont le service d’au moins un repas végétarien hebdomadaire depuis le 1er novembre 2019 et l’obligation de proposer au moins 50 %, en valeur monétaire, de produits dits « durables et de qualité », dont 20 % de la valeur monétaire totale issus de l'agriculture biologique à partir du 1er janvier 2022. Les autres concernent la lutte contre le gaspillage alimentaire et l’interdiction du plastique.
La capacité d’une offre végétarienne à améliorer la durabilité des repas servis en restauration scolaire en France a été quantifiée par MS-Nutrition et l’UMR MoISA29, en co-construction avec le collectif EnScol. Des milliers de séries de 20 repas scolaires ont été générées automatiquement selon divers scénarios.
Les résultats montrent l’intérêt d’augmenter la fréquence des repas végétariens (jusqu'à 12 repas sur 20 au lieu de 4 sur 20 actuellement) et de servir du poisson et des viandes blanches aux autres repas. Ceci nécessite une révision de la réglementation actuelle qui impose encore le service de viande rouge à l’école (au moins 4 fois sur 20). Il serait ainsi possible de diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) des repas scolaires (jusqu'à -50 % par rapport au niveau actuel), tout en garantissant leur bonne qualité nutritionnelle.
Un travail complémentaire (Figure 13) a montré que le type de plat principal influençait plus l’impact environnemental (notamment les émissions de GES) des repas que leur qualité nutritionnelle (Adéquation Nutritionnelle Moyenne représentant la richesse en nutriments protecteurs comme les fibres, les protéines, les vitamines, les minéraux et les acides gras essentiels), soulignant l’intérêt d’augmenter la fréquence des repas végétariens et de favoriser le porc ou la volaille plutôt que la viande de ruminants. Associer les changements proposés et les initiatives locales (Miramas, Briançon, Mouans-Sartoux…) en faveur d’une restauration scolaire plus durable (produits bio, locaux et de saison, cuisine maison, actions de sensibilisation…) est un pari gagnant-gagnant pour la nutrition et l'environnement.
Figure 13. Émissions de gaz à effet de serre (en kg eqCO2 ) et adéquation nutritionnelle moyennes (% des recommandations pour 2000 kcal) de différents types de repas scolaires obtenus par génération automatique de séries de repas composés d’une entrée, d’un plat principal (plat protidique + accompagnement), d’un produit laitier et d’un dessert (source : Poinsot et al., 2021).
Zoom 4. Quelle sécurité alimentaire en Méditerranée à l’horizon 2030 ?
L’Objectif de développement durable 2 (ODD 2) vise à « éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir une agriculture durable ». Cet objectif ne sera pas atteint en Méditerranée à l’horizon 2030. La répartition inégalitaire des richesses continue à entretenir l’insécurité alimentaire notamment au sein des territoires ruraux.
Au niveau méditerranéen, la disponibilité de la nourriture qui reste tributaire des importations a pour effet un déficit commercial agricole structurel. Représentant seulement 7 % de la population mondiale, les pays méditerranéens comptent encore pour un tiers des importations mondiales de céréales, car les ratios de dépendance aux importations céréalières restent très élevés (PNUE/PAM et Plan Bleu, 2020).
L’accès à la nourriture dépend d’une multitude de facteurs, notamment du pouvoir d’achat, des politiques de subventions dédiées à l’alimentation et de l’état des infrastructures. D’autres facteurs affectent la sécurité alimentaire dans la région méditerranéenne dont l’instabilité politique et les conflits, les changements climatiques, l’insécurité hydrique et l’érosion des ressources naturelles (sols, biodiversité). D’un point de vue nutritionnel, le surpoids et l’obésité atteignent un niveau alarmant dans de très nombreux pays méditerranéens et une forte prévalence de l’anémie affecte les femmes en âge de procréer.
D’ici 2030, la reconquête des sols et la préservation des eaux, conjuguées à une mise en œuvre efficace des mesures d’adaptation au changement climatique et une exploitation rationnelle des ressources naturelles, seront essentielles pour l’agriculture, base de l’alimentation des populations. L’Afrique du Nord est appelée à devenir la principale région importatrice de blé dans le monde et l’équilibre de la balance alimentaire pourrait être bien plus difficile à atteindre si les productions locales n’augmentent pas, affectant les budgets publics et la disponibilité des produits agricoles. La surnutrition et la malnutrition poseront des problèmes de santé publique préoccupants (maladies chroniques et obésité). Le coût de l'inaction pourrait être très élevé, car ne pas commencer à mettre en œuvre des politiques appropriées pourrait, dans un avenir proche, entraîner une instabilité sociale, et représente une politique dangereuse pour la région.
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