3.Quels aménagements pour limiter le risque inondation et protéger les infrastructures ?

Les principales villes de la région, notamment celles situées sur l’arc méditerranéen, sont potentiellement concernées par des aléas de débordement de cours d’eau ou de ruissellement. Ce dernier phénomène se traduit par des écoulements diffus en dehors de cours d’eau pérennes. En milieu urbain, le ruissellement est provoqué par les eaux qui ne peuvent pas être évacuées par le réseau pluvial lors de violents orages (Cannes en 2015 par exemple). Les projections climatiques prévoient une augmentation potentielle de la fréquence et de l’intensité des évènements pluvieux extrêmes (pluviométrie très forte sur un court laps de temps) sur le territoire régional.
Trois départements de la région (Alpes-Maritimes, Bouches-du-Rhône et Vaucluse) comptent entre 50 et 75 % de leurs hébergements touristiques marchands en zones inondables. Les touristes constituent par ailleurs une population particulièrement vulnérable vis-à vis de ces événements climatiques extrêmes du fait de leur manque de culture locale du risque, et de la barrière de la langue dans les actions de communication ou d’alerte.
La prise en compte des risques dans le développement ou la modernisation des infrastructures touristiques tend à se développer. Les principes d’aménagement reposent sur plusieurs leviers :

□ réduire le phénomène à la source en privilégiant les espaces naturels et procéder à la désimperméabilisation et la renaturation des sols (augmentation de la part des eaux infiltrées par rapport à celles ruisselées) ;

□ faciliter et organiser les axes d’écoulement dans l’espace public et les espaces investis par les nouvelles installations touristiques, avec, à la clé, la réalisation d’un schéma de gestion des eaux pluviales ;

□ diminuer les conséquences en réduisant la vulnérabilité des installations (batardeaux par exemple) ;

□ adapter la gestion de crise avec la mise en place d’un dispositif d’anticipation adapté (par exemple, par la mise en place de procédures de limitation de l’accès aux sites touristiques en fonction des conditions météorologiques et hydrologiques).

Les diagnostics peuvent conduire à la relocalisation de certains biens ou la mise en place d’ouvrages de protection. Les solutions fondées sur la nature, plus résilientes vis-à-vis du changement climatique, sont à privilégier (cf. §5.2). Pour les cours d’eau, il s’agit, par exemple, de la renaturation et de la libération d’un espace de mobilité des cours d’eau, ce qui améliore leur « divagation ». Ces projets peuvent être couplés à des aménagements touristiques et de loisirs (voies vertes, espaces publics, panneaux d’information multi-langues sur le risque, etc.).
À titre d’illustration, le renforcement des quais d’Arles (Photo 21), réalisé entre 2008 et 2015, constitue une opération visant à concilier protection des biens et requalification d’espaces à vocation touristique (la ville bénéficie d’une double inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO). L’endiguement du Rhône en traversée d’Arles a conduit à une augmentation des vitesses de courant pour un même débit, entraînant l’érosion des matériaux et une incision du lit, avec pour conséquence la création d’une fosse menaçant de déchaussement les fondations des quais pour certains datant de l’époque romaine. Dans le cadre du programme de sécurisation des lieux densément habités du Plan Rhône sous la maîtrise d’ouvrage du SYMADREM, les opérations de réparation et de réfection ont permis une amélioration du niveau de protection des zones urbaines d’Arles face aux crues et aux débordements de cours d’eau. Ces travaux structurants sont complémentaires aux actions de surveillance et d’alerte de la population qui définissent par exemple un plan de circulation dans la zone urbaine d’Arles en cas d’atteinte de seuils de débits du Rhône et la fermeture des accès aux quais avec la mise en place de batardeaux.

Interview I. Avenir de la baignade _ Laurent ARCUSET, gérant, GéoSystème

1. De manière générale, avec la répétition des sécheresses qui affectent les ressources en eau de surface et souterraines, la baignade estivale sera-t-elle encore possible à l’avenir dans les rivières et les lacs naturels ou artificiels de la région ?

Oui, la baignade sera toujours possible, mais il est évident qu’elle sera de plus en plus contrainte dans les rivières et les lacs, avec la multiplication des interdictions, comme cela a déjà été le cas sur les plages du lac de Serre-Ponçon. En même temps, l’inconfort thermique, associé à la hausse de la température de l’air, augmente les besoins en baignade des habitants, tous territoires confondus, et des visiteurs. Pour répondre partiellement à la demande qui ne cesse de croître, il existe plusieurs solutions :

□ les piscines individuelles privées,

□ les piscines collectives ou parcs aquatiques (publics ou privés),

□ les baignades en sites naturels aujourd’hui très majoritairement non autorisées.

L’augmentation du nombre de piscinespose aujourd’hui une sérieuse question d’impact environnemental lié à leur construction et surtout à leur entretien (alimentation électrique, remplissage et renouvellement de l’eau, désinfection de l’eau à l’aide de chlore essentiellement). Les normes et les recommandations publiques sont très peu favorables aux piscines écologiques (traitement par électrolyse, aux UV, à l’ozone…) et aux bassins de baignade naturels. Par « principe de précaution », l’administration publique française, à travers l’Agence régionale de santé, recommande des entretiens classiques dans son guide de bonnes pratiques et les professionnels du tourisme préfèrent suivre ses conseils par peur d’une fermeture de leur piscine.

2. Pour rafraîchir les habitants et les touristes en été, quelles options sont envisageables pour assurer des espaces de baignade de qualité et sécurisés, y compris dans les espaces urbains ?

Aborder en premier lieu la question de la qualité et de la sécurité des lieux de baignade n’est pas forcément un bon réflexe car elle confirme la prégnance de ces critères sur tous les autres, les décideurs s’abritant derrière eux pour interdire la baignade dans les fleuves, rivières et lacs. À ces critères s’ajoutent les impacts de la baignade sur la faune et la flore des espaces aquatiques, mais aussi les enjeux de partage de la ressource entre les différentes activités (agricoles, industrielles, énergétiques), sachant que les activités de loisirs sont rarement prioritaires car elles ne sont jamais associées à des besoins physiologiques et de bien-être (la chaleur jouant négativement sur le sommeil, l’humeur, les traitements médicaux…).

Les besoins de rafraîchissement sont naturels et salutaires. S’ils ne peuvent pas être résolus par la baignade, ils devront l’être par d’autres moyens souvent consommateurs d’énergie, comme la climatisation. Pourtant, il existe des ressources en eau abondantes si nous considérons les principaux cours d’eau (Rhône par exemple) ou canaux comme des lieux de baignade potentiels. Autrefois, cela était le cas grâce à un système de pontons flottants. D’autres pays, comme la Suisse, n’hésitent pas : baignade dans le Rhône à Genève, dans le Rhin à Bâle. En France, les progrès sont lents, mais ils existent, y compris à Paris, dans le canal Saint-Martin, sans oublier la promesse de se baigner dans la Seine dès l’été 2024 (les Jeux olympiques ont accéléré la volonté politique). Les fleuves, leurs anciennes gravières, leurs lônes (anciens lits), leurs canaux latéraux offrent très probablement des opportunités qu’il devient indispensable d’étudier. La région doit rejoindre le mouvement international qui tend à revaloriser les fleuves et les rivières urbains en tant que ressources, en considérant que l’accès à la baignade, pour les visiteurs et les habitants, n’est pas une problématique secondaire et que cela représente une bonne adaptation au réchauffement climatique.

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