3.La gestion de la fréquentation touristique dans le Parc national des Calanques

Le Parc national des Calanques couvre un territoire de 52 000 ha (cœur terrestre : 8500 ha ; cœur marin : 43 500 ha) au sein même de la Métropole Aix Marseille-Provence qui compte 1,8 million d’habitants. Espace de respiration pour les populations urbaines, la part des visiteurs locaux est prépondérante (environ 70 %). Il s’agit d’une véritable interface entre ville et nature car près de 200 accès au territoire sont dénombrés. Sa fréquentation s’étire sur toute l’année, sans réelle période creuse. Des pics de fréquentation ont déjà été constatés en été sur certains sites, comme dans les calanques de Sormiou, Sugiton et En-Vau (Photo 24), avec près de 2500 et 4000 visiteurs par jour pour les deux dernières. La multiplicité des pratiques dans le Parc, pas toujours compatibles avec sa fragilité, génère des conflits d’usages.

Classiquement, le Parc mobilise et utilise des outils de gestion, tels qu’un suivi de sa fréquentation qui reste complexe à appréhender ou la mise en place d’aménagements (balisage, aménagement des sentiers, mise en défens) qui canalisent les flux et protègent les espaces naturels les plus sensibles. Des outils plus innovants, visant le recul de l’accès en véhicules motorisés, l’encadrement des activités de sport de nature et de plaisance (règlementation de la plaisance et du kayak) et une communication qualifiée de « démarketing », sont développés. L’objectif du démarketing est avant tout de privilégier une communication sincère montrant le décalage entre la réalité et l’image de carte postale véhiculée par les médias. Elle renseigne aussi sur l’expérience sur site à laquelle sera confronté le touriste en cas de forte fréquentation. Le territoire a déjà atteint un seuil qualifié de situation d’hyperfréquentation, notamment à la sortie des confinements de la Covid-19. Dans ce contexte, le Parc a réagi en mobilisant un outil expérimental : le contingentement. Le choix du site de la calanque de Sugiton s’est imposé vu son accessibilité facile, sa situation de très forte érosion des sols et la destruction de ses habitats naturels. Le projet « Réserver, c’est préserver » conduit sur la calanque de Sugiton (cf. §1.2) l’été 2022 a constitué un réel challenge de mise en œuvre pour l’équipe du Parc. Ses objectifs étaient à la fois de préserver le milieu naturel soumis à une très forte érosion des sols et de la flore, d’améliorer la qualité de l’expérience avec un réel espace disponible par visiteur et une ambiance de quiétude permettant de renouer avec le caractère exceptionnel du Parc. L’expérience a porté sur 45 jours en juin, juillet et août sur une zone qui a été règlementée H24. L’accès au site étant conditionné à l’obtention d’un permis de visite gratuit avec une jauge fixée à 400 personnes jour

Le plan de communication anticipé et décliné en amont des accès au site, ainsi que l’application de réservation développée par TROOV, ont été des leviers de réussite du dispositif. L’accueil sur site depuis Luminy s’est opéré en deux temps : des points d’information et de sensibilisation, voire de réorientation sur d’autres sites, puis des points de filtrage assurés par une société de sécurité professionnelle. Plébiscitée par le public (conditions de visite de qualité retrouvées), l’expérimentation a permis de freiner l’érosion galopante du site. Les premiers suivis scientifiques permettent de déceler des indices encourageants concernant la reprise de la végétation dans les zones très dégradées. Néanmoins, l’évaluation de l’efficacité de la mesure sur la régénération des milieux naturels ne peut s’apprécier que sur plusieurs années. Le conseil d’administration a ainsi décidé d’inscrire la mesure sur une durée de 5 ans (2023-2027). Les perspectives d’amélioration du dispositif reposent principalement sur une extension de la durée de sa mise en place sur la période estivale (70 jours en 2023) et une adaptation du système de réservation pour libérer des places disponibles en cas de désistement.

Zoom 8. La régulation de l’hyperfréquentation estivale dans le Parc national de Port-Cros

L’île de Porquerolles accueille plus d’un million de visiteurs par an avec des pics de fréquentation de 12 000 visiteurs par jour en période estivale, affectant à la fois l’environnement et la qualité de visite. En 2021, la ville de Hyères, la Métropole Toulon Provence Méditerranée et le Parc national de Port-Cros ont conjointement mis en place un ensemble de mesures et de dispositifs pour réguler les transports acheminant les visiteurs sur l’île. Cette démarche s’appuie sur un nouveau contrat de délégation de service public de transports maritimes et une charte signée par les principaux bateliers privés desservant l’île. L’objectif de 6000 visiteurs par jour a été fixé collectivement d’après les résultats d’une enquête de satisfaction menée par le Parc national de Port-Cros.

Le bilan de cette gestion raisonnée, concertée et des dispositifs associés a été positif : l’objectif de fréquentation a été atteint. En effet, la fréquentation de la TLV-TVM (Photo 25), délégataire du transport vers les îles, a baissé de 14 % permettant le respect de la jauge de fréquentation. La mise en place d’un dispositif de réservation en ligne a permis de mieux anticiper les pressions de fréquentation sur la destination et une meilleure diffusion des publics dans le temps. De plus, les opérateurs incitent fortement les usagers à utiliser les transports en commun pour se rendre aux embarcadères (+20 % de fréquentation de la ligne 67 du Réseau Mistral) dont le coût est pris en charge par la Métropole dans le cadre du billet combiné bus + bateau bus TLV-TVM (10 000 voitures évitées sur la presqu’île de Giens). En parallèle, un arrêté municipal interdit l'échouage (beachage) des bateaux sur les plages et une zone de mouillage et d’équipements légers (ZMEL) dans les eaux de Porquerolles a été créée. Fort de ce succès, le dispositif de régulation de la fréquentation sera prochainement renforcé par des mesures complémentaires.

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