Depuis une vingtaine d’années, les microalgues benthiques toxiques du genre Ostreopsis (Dinoflagellés), originaires des tropiques, prolifèrent en été dans différentes zones tempérées (bassin méditerranéen, Japon, Nouvelle-Zélande, Brésil). Des études scientifiques mettent en avant le rôle important de la température de l’eau de mer sur l’intensité des efflorescences estivales qui semblent se produire lors des années les plus chaudes. L’implication du changement climatique dans l’extension de ce phénomène en zones tempérées a donc été suggérée, mais aucune preuve scientifique robuste n’a encore été produite. Il pourrait également s’agir d’espèces introduites, dont le développement serait facilité par le réchauffement climatique et les activités anthropiques.
En Méditerranée, Ostreopsis se développe en période de forte chaleur (juillet, parfois août) à très faible profondeur (0,5 m), principalement sur les zones rocheuses recouvertes de macroalgues. Des mortalités d’invertébrés marins (mollusques, oursins, crabes…) sont observées lors des efflorescences les plus importantes. Les microalgues peuvent se détacher du fond, et se concentrent alors à la surface de l’eau (photo 6). C’est là où se situe est le principal danger : en cas de vent, les microalgues, leurs fragments ou leurs toxines peuvent être transportés par les aérosols, et même les personnes hors de l’eau (sur les plages, les routes ou dans les habitations) peuvent être affectées par simple contact ou inhalation. Les Dinoflagellés benthiques sont connus dans les zones tropicales pour être à l’origine d’intoxications alimentaires sévères, suite à la consommation de crabes ou de poissons. Aucune intoxication alimentaire liée à Ostreopsis n’a été recensée jusqu’à présent en zones tempérées.
En Méditerranée, les signes les plus fréquents associés à Ostreopsis sont des irritations cutanées ou oculaires, mais des symptômes de type grippal avec des difficultés respiratoires peuvent aussi apparaître. Ces 20 dernières années, trois évènements de symptômes collectifs, impliquant à chaque fois plus de 200 personnes, ont été observés en Italie, Espagne et Algérie. Ces évènements collectifs posent parfois des problèmes d’engorgement des services d’urgence avec le risque de prise en charge retardée de patients atteints d’autres pathologies. Une analyse sociologique exploratoire réalisée en Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2014 montre que le phénomène est aujourd’hui largement méconnu du grand public. Les acteurs sociaux interviewés, les usagers et les gestionnaires de plages ne font pas ou peu le lien entre Ostreopsis et les symptômes dont elle peut être à l’origine, quand bien même les ont-ils déjà ressentis.
Si la fermeture temporaire au coeur de la haute saison touristique (août 2013) d’une des plages de Villefranche-sur-Mer a marqué les mémoires des usagers locaux et des habitués, elle n’est cependant pas associée au bloom d’Ostreopsis pourtant à l’origine de l’arrêté municipal, mais à une pollution momentanée.
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